mardi 20 octobre 2009

Jack Bauer ? It's me

Avant, j’étais systématiquement en retard. Ma vie c’était un épisode de 24 heures chrono sans les pauses pub.

Je croyais en une DVNI, Divinité Valable Non Identifiée. J’y pensais quand je me trouvais à cavaler sur escarpins hauts dans le couloir infini d’une correspondance de métro. Je me disais que même si j’étais partie en retard, cette divinité au dessus de tout, au dessous de nous, au dessus de moi pauvre femme sur talons à hauteur indécente, au dessus du temps, ferait un miracle rien que pour ma pomme et se débrouillerait pour que hop, en un claquement de doigts divins, une demi heure de temps disparaisse loin dans l’espace et que j’arrive à l’heure. Je l’implorais en courant comme si ma vie en dépendait.

Je ratais ma correspondance et là, mon cœur s’emballait. Je sentais une sueur froide atroce couler le long de ma colonne vertébrale et attendais l’arrivée du métro d’après comme si l’avenir économique mondial en dépendait. Comme Jack Bauer je répétais telle une maniaque, mille fois mon excuse :

- J’allais partir quand un cambriolage a eu lieu dans l’immeuble. La police était là et personne n’a eu le droit de sortir durant 15 minutes. Et mon téléphone captait pas.

- Horrible, une copine vient de trouver son mec avec sa demoiselle d’honneur…je pouvais pas raccrocher.

- J’ai croisé mon ancien grand amoour. Tu sais, Arthur. Il a commencé à me raconter qu’il pensait souvent à moi, que je lui manquais atrocement, qu'il avait gaché sa vie en me perdant, alors impossible de filer tu comprends…

Puis je prenais la mauvaise sortie de métro. L’horreur. Ma vie au ralenti. Les meilleurs moments qui défilent devant mes yeux avec des taches blanches dedans parce que j’ai beaucoup trop couru. Puis ma cheville qui se tord en un craquement épouvantable. J’ai mal, je boite, mais je continue quand même.

Là, essoufflée, décoiffée, les joues rouges, j’arrivais enfin, à bout de nerfs, de forces, de douleur, le corps souffreteux comme si on m’avait battue, et je m’écroulais au pied de la personne avec qui j’avais rendez-vous, sur mon siège dans la salle d’examen, devant un directeur de casting, face à mes parents furieux déjà assis à table, et là, en un dernier souffle, je distillais les ultimes mots de courage, tel le Héros condamné à une mort lente et douloureuse, mais qui l’affronte, avec fierté et honneur :

- Jamais je n’aurai de montre, vous m’entendez ? JAMAIS !





Aucun commentaire: